Editorial du dimanche 24 mai 2015

Viens Saint Esprit !

À chaque fête que nous célébrons, nous pouvons légitimement nous demander dans quelle mesure la liturgie nous permet de recevoir les grâces propres au mystère célébré. Dans le cas de la Pentecôte, il s’agit de se demander si les dons du Saint Esprit sont bien répandus sur l’Église et sur ses membres en particulier…

La plupart de nos fêtes religieuses sont liées à un évènement de l’histoire ; c’est le cas de la Pentecôte, comme la Nativité du Seigneur ou sa Résurrection, pour ne citer que les principales… et elles consistent, pour une part, à en faire mémoire. Or, une mémoire ou un anniversaire ne reproduit pas l’évènement. Pour qu’il en soit autrement, il nous faudrait maîtriser toutes les conditions de production de l’évènement à la manière d’une expérience de laboratoire… Mais il est au moins un facteur que nous ne maîtrisons pas, c’est la liberté de Dieu, et Dieu a voulu que ces évènements historiques aient lieu une fois pour toutes.

Malgré cela, la prière d’ouverture de ce jour ose demander au Seigneur de répandre les dons du Saint Esprit sur l’immensité du monde et de continuer dans les cœurs des croyants l’œuvre d’amour entreprise au début de la prédication évangélique. Telle est l’attente en ce jour de très nombreux fidèles ; certains d’ailleurs ont pu prier toute une nuit et se préparer pendant plusieurs jours à une nouvelle effusion de l’Esprit. On peut alors se dire que cette demande n’engage que ceux qui mettent leur foi en elle, et surtout qu’elle ne saurait impliquer de manière automatique une nouvelle effusion.

Toutefois, la deuxième partie de la prière évoque une continuité de l’action de Dieu depuis le temps de la prédication évangélique. Cela nous permet de préciser que la Pentecôte que nous fêtons n’est pas un simple évènement du passé mais un évènement permanent, toujours renouvelé. La raison est simple : le Seigneur n’a pas donné son Esprit pour le reprendre ensuite mais pour qu’il demeure toujours dans son Église, pour la sanctifier et la vivifier, en tout lieu et à toutes les époques. La totalité du temps de l’Église était en fait embrassée dans l’aujourd’hui de l’évènement historique (cf. Joseph Ratzinger, l’Esprit de la liturgie). Cela change tout… Ainsi, tout en appartenant à l’histoire, la Pentecôte appartient aussi à toutes les époques. Nos liturgies s’appuient sur cette permanence voulue par le Seigneur. Elles nous permettent alors de dépasser l’acte de mémoire accompli en préalable, pour nous rendre véritablement contemporains des évènements permanents sur lesquels elle se fonde. C’est à ce titre qu’elles peuvent finalement nous donner accès aux mêmes grâces. Il ne nous reste plus qu’à être bien disposés à les accueillir…

Père Pierre Labaste